Vivre-ensemble
Vivre à plus de vingt soeurs, issues de générations, de milieux culturels, sociaux, etc. divers, est une richesse et un défi quotidien! Cela demande sans cesse de "s'ajuster" pour être "au plus juste" dans nos relations entre nous, mais aussi avec les personnes rencontrées...
La vie communautaire est un vrai révélateur de chacune, où l'on apprend beaucoup sur soi-même.
Vivre côte-à-côte
Du lever nocturne où l'on se retrouve pour l'office de Vigiles jusqu'à l'office de Complies - qui marque le début du grand silence de la nuit -, notre vie se déroule côte-à-côte. Nous partageons la prière communautaire, les repas en commun, le "chapitre" le matin où la mère abbesse commente un chapitre de la Règle de Saint Benoît... Certains ateliers de travail reposent aussi sur un travail collectif, notamment la fromagerie le jeudi après-midi.
Il n'y a guère que les dortoirs qui ont été abandonnés! Chacune dispose désormais d'une cellule. En 2022, nous en avons rénové 10... il était temps car les précédentes avaient été construites bien rapidement dans les années 1970.
Chez les cisterciens, la cellule a une place minimale: c'est le lieu où nous dormons. Notre lectio se fait dans une pièce commune (le scriptorium) et l'oraison se fait à l'église ou dans la nature... Elle est néanmoins un lieu de silence et de solitude.
C'est un autre défi de la vie monastique selon notre tradition: tenir un équilibre, toujours précaire, entre la vie commune et la solitude, essentielle à la prière.
Vie fraternelle et silence
En tout temps les moines doivent cultiver le silence, mais surtout aux heures de la nuit. (Règle de Saint Benoît, chapitre 42)
Le silence est indispensable pour permettre la vie communautaire et respecter la prière de chacune.
La façon de le concevoir a néanmoins bien changé. Pendant très longtemps, moines et moniales cisterciens n'ont échangé que par signes : parler vocalement était très limité. Mais, sous réserve que l'interlocuteur comprenne, il était possible de dire bien des choses par voie de gestes!
Aujourd'hui nous communiquons peu par gestes, même s'ils sont bien utiles pour les petites demandes, spécialement dans les lieux où le silence demeure d'or (comme le réfectoire, l'église...).
Avoir plus aisément recours à la parole permet de faciliter la vie fraternelle... mais encourage à plus de discipline et interroge sur notre rapport au silence. Il n'est pas une chape imposée. Il est là pour permettre d'approfondir notre relation à Dieu. C'est à un silence habité que nous sommes appelé(e)s !
Le silence est aussi là pour faciliter l'écoute: de la Parole de Dieu, des lectures faites pendant le repas. Le midi nous lisons des articles d'actualité ou un ouvrage (histoire, spiritualité, témoignages...). Le soir, nous lisons le martyrologe de l'église universelle (pour connaître la fête ou la mémoire du lendemain), ainsi que le ménologe de la communauté (un petit résumé de la vie et de la personnalité des soeurs dont ce sera l'anniversaire du décès le lendemain).
Pardon et vie commune
Parler a un pendant: pardonner.
Le chapitre des coulpes a longtemps été un lieu où les soeurs ayant commis une faute étaient "proclamées" (dénoncées), afin qu'elles corrigent leur comportement. Il a changé aujourd'hui: plusieurs fois par semaine, nous pouvons demander pardon d'une erreur, d'un oubli, d'une maladresse... Ce temps, essentiel à la vie commune, permet de vivre davantage en vérité envers nos soeurs... et envers nous-mêmes.
Le mandatum a évolué. Auparavant, ce lavement des pieds avait lieu chaque semaine, au changement de service hebdomadaire (lecture de table, service d'église...). Désormais, il a lieu moins souvent, d'une façon peut-être moins mécanique. Ce temps - auquel l'évangile selon saint Jean accorde la même place qu'à l'Eucharistie! - est précédé d'une plus grande préparation spirituelle.
Nous sommes invitées à imiter la position du Christ en lavant les pieds de notre voisine, comme Jésus le fit avec ses disciples le soir de la Cène, et celle de la pécheresse en embrassant ses pieds, comme Marie Madeleine le fit pour Jésus. Cela nous conduit à nous laisser forger vers la ressemblance de Dieu et à assumer notre humanité!
Vie fraternelle et temps de fête
La vie fraternelle se construit dans l'ordinaire des jours, dans l'entraide, le travail en commun, mais aussi dans des temps plus marqués. Ils sont pour nous occasions de rencontres et d'échanges plus approfondis. Ainsi en va-t-il notamment pour les fêtes de la saint Joseph (19 mars), de la saint Benoît (11 juillet) et de la saint Bernard (20 août) ou pour les journées de "rupture de rythme" après Noël et Pâques.
Ce sont des temps de partage et de convivialité: pique-nique, promenades en forêt, scénettes ou jeux de société, voire, si le temps le permet, pétanque... Une façon d'apprendre à mieux se connaître !