Anne Marie PELLETIER
Au point de départ du livre se trouve un conte, certainement très ancien (Xe siècle), provenant peut-être d'Edom ou de Transjordanie, en tout cas plein de références au monde du Proche-Orient du deuxième millénaire. Ce texte primitif traite de manière traditionnelle dans la Bible la question de la souffrance innocente. Il décrit le malheur qui vient frapper un homme riche et jusqu'alors heureux, dénommé Job (un nom largement attesté dans ces régions), personnage symbolique de la sagesse païenne. Celui-ci est présenté comme un contemporain des Patriarches, il est fils de l'Orient. Comme tel, il n'est donc pas un Israélite. En cela le Livre de Job a l'amplitude de l'universel et pose d'emblée la question de la souffrance innocente, indépendamment de toute appartenance religieuse. Le juste peut vivre jusqu'au bout l'épreuve de la souffrance sans que Dieu se manifeste en sa faveur. Tel est le scandale indépassable. Alors que dans le conte moyen-oriental, le héros souffrait mais gardait le silence, dans l'histoire juive ou judaïsée, il souffre du silence de Dieu plus que des catastrophes qui l'atteignent jusque dans sa chair.